Un matin frais, comme n'importe quel autre. New York, en continuelle effervescence. Central Park, ses grilles, à peine ouvertes. Les quelques vendeurs ambluants qui commencent à peine à déballer leur stand. Et Hélène Shemds, paisiblement en tailleur, sur un banc, une cigarette dans une main, une canette de bière et un sac indiquant un traiteur chinois posé près d'elle sur ce même banc. Le regard dans le vide, la tête ailleurs, tandis que tout s'activait autour de la demoiselle.

Pourquoi attendre l'ouverture des griles pour arriver en même temps que tout le monde, quand il est tellement plus simple d'escalader une grille par ci par là, et de se glisser dans le parc désert alors que tous sont encore bien au chaud dans leur lit ? Cet endroit, de nuit, convenait tellement bien à Hélène qu'elle aurait stoppé le temps si elle l'avait pu. Calme, désert, tranquille, paisible, dénué de toute vie humaine qui pourrait venir troubler sa tranquillité. Comment les gens pouvaient-ils supporter de vivre les uns sur les autres dans les rues bondées, quand des moments comme celui-ci étaient à portée de main ? La philosophie d'une grande majorité des américains échappait à Hélène. Comme beaucoup de choses d'ailleurs. Leur passion pour les glaces et les hot dog en faisait aussi partie. C'est d'ailleurs pour cette raison que la blondinette attrapa son sac en platiques et sa bière, décollant rapidement du banc où elle était traquillement assise, alors qu'un homme au ventre impressionnant arrivait en poussant son stand à nourriture.

Hélène se dépêcha de fuir cet endroit, préférant les petites allées aux grandes artères, commençant à y errer alors que les hommes d'affaires pressés et les enfants matinaux arrivaient en masse, tandis que le jour se levait doucement. Trop rapidement, cependant, au goût de miss Shemds, qui pesta contre la rapidité de l'aube et de la nuit. Trop rapide.

Trop rapide, comme cet abruti qui passa en vélo, manquant de renverser la japonaise dans la lune qui marchait lentement, lui lançant à la figure des injures plutôt que des excuses, faisant dangereusement osciller sa bière dans sa canette. Hélène pesta, se demandant un instant ce qui l'a retenait d'aller faire avaler son vélo en pièces détachées à cet énergumène. Peut être la fatigue, où le principe de se dire que son esprit s'est occupé lui même de son compte, et qu'il va de toutes façons subir le contrecoup de son acte. Un tas de choses en réalité.

Aussi peut être le fait qu'Hélène n'apperçoive une silhouette qu'elle finissait par relativement bien connaître au loin, celle de Jarod Lloyd, un membre de la secte, tout comme elle, ou du moins, un ancien membre. Triste histoire. Toujours est-il qu'elle s'avança lentement vers le jeune homme qui lui tournait le dos, errant certainement, lui aussi, par cette agréable matinée et son soleil pas encore totalement levé. Elle lui tapa déclitamene tsur l'épaule, alors qu'elle était arrivée à sa hauteur.

Hélène se heurta à la réalité quant à la réponse de Jarod. C'est vrai. Il avait tout oublié. Etrangement, un sentiment de peine l'envahie. Etait-ce parcequ'il était son ami ? Certainement. En réalité, Hélène en était pesudée. Même aux vues de sa conception relativement étrange de l'amitié, la confiance était quelque chose de totalement subjectif pour elle. Mai malgré tout, elle savait parfaitement que ce sentiment de froid qui avait ampli sa tête, son corps, tel un sceau d'eau glacée qui se verse sur sa tête, venait de là.

La tristesse. Encore une chose à laquelle elle n'était pas spécialement, même pas du tout habituée. Comme quoi il faut un début à tout. Toujours est-il qu'elle ne laissa rien transparaître, se contentant de lui adresser un léger sourire en coin.

-Peut être, oui.

Elle jeta rapidement son mégot dans un cendrier à quelques centimètres de ses mains, continuant, après un arrêt laissant planer sa réponse dans l'air :

-C'est une bien belle matinée, pas encore terminée, et je vous avouerais qu'a errer depuis un certain temps dans ce parc, une ballade serait la bienvenue. J'imagine que vous comptez sortir de ce parc, alors, puis-je vous accompagner pour cette fois ?

Elle lui adressa un sourire rassurant, rajoutant :

-Si ça ne vous dérange pas, bien sûr.

Que c'était étrange de le vouvoyer ! Et pourtant, Hélène avait choisi de taire le fait qu'elle le connaisse. De laisser les choses se faire. Pour une fois, la compagnie lui semblait plus attrayante que la solitude.

-Sans problème, il est vrai qu'on ...

Finit par se connaître ... Finissait ... Hélène enchaîna, faisant comme si elle n'avait jamais marqué de temps d'arrêt dans sa phrase pour se retenir de dire une bêtise.

-Fait partie de la même université, alors autant partir sur de bonnes bases !

Elle lui adressa un sourire sincère, recommençant à marcher à ses cotés, laissant le silence retomber entre eux deux. Pourtant, pour une fois, ce fut Hélène qui le brisa en premier, en déclarant d'une voix posée.

-Au fait, je m'appelle Hélène. Hélène Shemds. Et toi ?

Lui demanda t-elle en se tournant vers lui, bien qu'elle connaisse parfaitement la réponse. Mais quelle tête ferait-il si elle lui sortait son prénom, son nom, et par la même occasion qu'elle avait accompli des meurtres en sa compagnie, alors qu'il croyait qu'ils venaient à peine de se rencontrer ? La blonde ne préférait pas prendre le risque ... Alors, elle se contenta d'attendre patiemment sa réponse, tout en marchant calmement à ses cotés...